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Erreur de l'IA : Qui est réellement responsable quand l'algorithme se trompe?

Erreur de l'IA : Qui est réellement responsable quand l'algorithme se trompe?
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Lorsqu'une intelligence artificielle commet une erreur dans un processus notarial, la question devient vertigineuse: qui en répond juridiquement? Le notaire qui l'utilise? Le développeur qui l'a créé? L'assureur? La réalité est bien plus complexe qu'elle n'y paraît. Alors que l'AI Act européen impose désormais une surveillance humaine renforcée, les notaires doivent comprendre les contours flous d'une responsabilité algorithmique encore en construction.


Ce qu'il faut retenir :


  • La responsabilité en cas d'erreur IA ne repose jamais sur l'algorithme lui-même, mais toujours sur des acteurs humains

  • Légalement, le notaire reste le responsable principal auprès de son client, même si l'erreur provient de l'algorithme

  • L'AI Act impose une surveillance humaine efficace pour les systèmes à haut risque, renforçant les obligations de vigilance du notaire

  • La couverture assurantielle pour les erreurs IA n'est pas systématique : les politiques "silencieuses" laissent planer le doute sur l'indemnisation, tandis que les politiques "affirmatives" précisent clairement les conditions de couverture

La chaîne des responsabilités : une architecture complexe

Contrairement à une idée reçue, un algorithme ne peut jamais être responsable d'une erreur. Seuls des acteurs humains peuvent l'être. Cette distinction, que les juristes appellent l'absence de personnalité juridique des systèmes d'IA, est le point de départ obligatoire de toute analyse en matière de responsabilité algorithmique.

Lorsqu'une erreur IA entraîne un dommage, plusieurs acteurs peuvent être impliqués dans la chaîne. Le concepteur ou le développeur porte une part de responsabilité pour les défauts de conception, les biais présents dans le code ou une mauvaise documentation. Le fournisseur de données utilisées pour l'apprentissage de l'IA peut être mis en cause si le jeu de données était de mauvaise qualité ou contenait des biais manifestes. L'intégrateur, qui assemble les composants pour créer un produit, peut également voir sa responsabilité engagée si l'interaction entre les systèmes produit des effets imprévisibles. Enfin, l'utilisateur final – le notaire en l'occurrence – demeure responsable de son usage et de sa supervision.

Cette multiplication des responsabilités potentielles pose un défi majeur : dans la pratique, le notaire qui utilise l'IA demeure le responsable principal face à son client, même s'il n'est pas l'auteur direct de l'erreur. Cela crée une situation paradoxale où le notaire doit rendre des comptes sur une décision qu'il n'a pas entièrement maîtrisée, ce qui justifie d'autant plus l'importance d'une surveillance vigilante.

Le notaire face à l'algorithme : une responsabilité sans fuite

Pour engager la responsabilité civile d'un notaire en cas d'erreur IA, trois conditions doivent être réunies : une faute, un dommage certain et un lien de causalité directe. Ici réside le premier écueil. Démontrer que le notaire a commis une faute devient plus complexe lorsqu'une machine a recommandé une action. Le notaire peut-il être réputé fautif d'avoir suivi l'avis d'un algorithme réputé fiable ?

Une décision de la Cour d'appel de Paris d'octobre 2024 éclaire cette ambiguïté. La Cour a considéré que lorsqu'un système d'IA produit un résultat biaisé ou discriminatoire, la responsabilité incombe à l'utilisateur qui n'a pas vérifié ou contesté les résultats produits. Ce précédent est crucial : il signifie que le notaire ne peut pas s'abriter derrière l'automatisation pour justifier son inaction. Il doit exercer un contrôle effectif, apparemment dû être le sien, de sorte que la délégation à la machine ne le dispense pas de vigilance.

C'est précisément ce que renforce l'AI Act. En imposant une supervision humaine efficace pour les systèmes à haut risque, le règlement européen rend cette vigilance obligatoire et documentée. Le notaire n'est plus libre de faire confiance aveuglément à son algorithme. Il doit le questionner, vérifier ses résultats, et pouvoir justifier que cette vérification a eu lieu.

L'AI Act : une nouvelle architecture de la responsabilité

Adopté en mars 2024 et entré en vigueur le 1er août 2024, le règlement européen sur l'intelligence artificielle introduit une approche révolutionnaire fondée sur les risques. Les systèmes d'IA sont désormais catégorisés selon leur potentiel de dommage : inacceptable (interdits), haut risque, risque limité et minimal.

Les outils d'IA utilisés dans les études notariales touchent à des domaines sensibles – protection des droits fondamentaux, accès à la propriété, validité des contrats. Ils sont susceptibles d'être classés en haut risque. Pour ces systèmes, l'AI Act exige plusieurs garanties : une gestion rigoureuse des risques, une gouvernance stricte des données, une documentation technique exhaustive, des tests réguliers, et surtout, une supervision humaine permanente.

Cette supervision n'est pas optionnelle. Elle signifie que le notaire doit conserver la maîtrise finale des décisions, qu'il doit être en mesure d'intervenir et de contredire l'algorithme, et que cette capacité d'intervention doit être fonctionnelle et attestée.

La couverture assurantielle : un paysage flou et fragmenté

L'un des points les plus préoccupants pour les professionnels du notariat concerne l'assurance responsabilité civile. Tous les notaires sont tenus d'assurer leur responsabilité civile professionnelle en vertu de la réglementation française. Mais couvre-t-elle vraiment les erreurs provoquées par une IA ?

Certaines polices sont "silencieuses" : elles ne mentionnent ni n'excluent révéler la couverture des pertes dues à l'IA. Cette ambiguïté laisse le tri de l'indemnisation entre les mains de l'assureur, qui peut refuser ou accepter selon son interprétation. Cette incertitude est profondément insatisfaisante en cas de sinistre majeur.

D'autres politiques sont "affirmatives" : elles énoncent clairement comment et dans quelles conditions les erreurs liées à l'IA sont couvertes. Ces polices offrent la certitude attendue et détruisent les débats futurs. Malheureusement, elles restent rares et exigeantes souvent un surcoût.

Le notaire doit donc se poser une question clé : sa couverture d'assurance mentionne-t-elle spécifiquement les risques liés à l'IA ? Si non, il est temps d'en discuter avec son assureur. Une simple conversation pourrait épargner des années de litige.

Répartition des responsabilités : qui paie réellement ?

En pratique, lorsqu'une erreur IA provoque un dommage, plusieurs scénarios de responsabilité peuvent se dérouler. Si le défaut provient clairement du code ou de la conception de l'algorithme, le développeur ou le fournisseur de la solution peut être mis en cause. Si le dommage résulte d'une utilisation non conforme aux recommandations ou d'une surveillance insuffisante, le notaire est responsable. Si le jeu de données utilisé pour entraîner l'IA contient des biais manifestes, le fournisseur des données peut être poursuivi.

En réalité, c'est souvent une combinaison. Un algorithme imparfait utilisé sans vigilance par un notaire qui n'a pas testé sa fiabilité ou qui n'a pas vérifié ses résultats engage la responsabilité du notaire. C'est d'ailleurs la tendance jurisprudentielle qui se dessine : les tribunaux attendent du professionnel qu'il exerce un contrôle de qualité sur les outils qu'il utilise, sous peine de voir sa responsabilité engagée même en cas d'erreur technique.

Cette répartition en cascade signifie aussi que le notaire doit mettre en place des processus de vérification interne robustes.

L'absence de directive responsabilité : un vide à combler

Initialement, la Commission européenne avait proposé une directive spécifique sur la responsabilité en cas de dommages causés par l'IA, destinée à alléger la charge de la preuve des victimes. Le 11 février 2025, cette proposition a été retirée sous la pression des lobbies technologiques. Ce retrait est significatif : il signifie que pour l'instant, les victimes d'erreurs IA doivent s'appuyer sur les régimes classiques de responsabilité civile, qui n'ont pas été conçus pour cette réalité nouvelle.

Dans ce vide, l'AI Act demeure le principal cadre réglementaire. Mais il vise davantage à imposer une supervision qu'à créer un droit à réparation spécifique. Les notaires doivent donc s'adapter en attendant une clarification législative plus claire.

Le point de vue de Notariat Services

"L'intelligence artificielle doit être un amplificateur de la capacité du notaire à vérifier, à analyser et à décider. Chez Notariat Services, nous construisons nos solutions IA autour du principe que le notaire reste aux commandes. Delos, notre suite bureautique IA, intègre des mécanismes de trace et de contrôle qui permettent au notaire de vérifier facilement ce que l'algorithme a fait et pourquoi. C'est cela, le vrai contrôle humain." — François-Xavier DUNY, Président du Groupe Notariat Services

Le mot de la fin

La question "Qui est responsable quand l'IA se trompe ?" n'a pas de réponse simple. Mais elle a une réponse claire : le notaire reste responsable. Le règlement européen, la jurisprudence émergente et les politiques d'assurance le confirment tous. Cette responsabilité peut être partagée avec d'autres acteurs – développeurs, fournisseurs, assureurs – mais elle ne disparaît jamais.

C'est une charge, certes, mais aussi une protection. Tant que le notaire maîtrise et supervise son algorithme, il conserve son autorité professionnelle et sa crédibilité auprès de ses clients. C'est d'ailleurs l'enjeu central de l'AI Act : transformer l'IA d'un outil de délégation en un instrument de vigilance augmentée.

Sources

Règlement européen sur l'intelligence artificielle (AI Act) – Commission européenne, 2024

Intelligence artificielle et responsabilité juridique : qui est responsable en cas d'erreur ? – Ellipsis Avocats, avril 2025

Quel régime de responsabilité pour l'IA ? – NAAIA.ai, janvier 2025

 

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Auteur :
Léane Frizac
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Léane Frizac
Chargée de communication
Experte en marketing digital et communication, Léane crée pour Notariat Services des contenus sur l’immobilier, la digitalisation et les innovations notariales. Passionnée d’art et d’écriture, elle allie expertise technique et sens du relationnel pour rendre l’information spécialisée accessible à tous.
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